Il était environ 20h. Elle avait travaillé de trop nombreuses heures aujourd’hui, au PEI, notamment avec les nouveaux instructeurs, et d’autres dossiers, dont une nouvelle recrue possible – la deuxième aujourd’hui, ça s’enchaînait vite. Cette fois-ci, contrairement à la dernière arrivée de cette nuit, c’était officiel, et c’était la représentante du MIS au SIS qui l’avait amené. C’était à nouveau un garçon. Il n’y avait pas beaucoup de filles, mais cela ne dérangeait pas tellement Kathleen. Elle n’était pas vraiment sur que les filles soient capable d’endurer le traitement de MIS. En fait, elle n’en savait rien, et n’avait pas trouvé de réponse à la question. Voilà pourquoi elle avait autorisé les deux sexes, malgré de vives critiques à ce sujet. Mais les critiques, elle n’en avait plus grand-chose à faire, à vrai dire, tellement elle s’en était farcie. Elle ne les prenait en compte que lorsque celles-ci s’avéraient constructives, ce qui était malheureusement trop peu souvent le cas…

Voyant l’heure, elle se leva, et prit la route de l’entrée du domaine, où elle avait rendez-vous à huit heures quart précise. Elle fit la route qu’elle avait maintenant déjà effectué de nombreuses fois – elle aurait pu la parcourir les yeux fermés, Kathleen en était sûr.

Le hall était là, devant elle. La femme y pénétra, et alla bavarder avec le garde, voyant qu’il était un peu trop tôt. Il faisait très chaud à l’intérieur du bâtiment. Elle plaignait sérieusement le garde, qui ne bronchait pourtant pas. Un bon gars, celui-là, se dit la directrice. Mais il faisait chaud partout. On transpirait même lorsque l’on ne bougeait pas. Kathleen n’aimait pas trop quand il faisait aussi chaud, et elle détestait cela d’autant plus lorsqu’elle avait autant de travail.

Au moment où la femme sortit, une voiture s’arrêta devant le bâtiment. Elle aimait bien créer un effet de coordination temporelle dans les diverses arrivées, cela faisait toujours bonne impression, elle trouvait.

Miss Finway vint vers la directrice. Elles se serrèrent dans les bras – cela faisait longtemps que les deux amies ne s’étaient plus vues, parce qu’avec leur travail exigent, elles n’avaient tout simplement plus le temps pour les sorties entre copines. Même si cela manquait un peu à la directrice. Elles discutèrent un peu ensemble, avant d’en venir à l’agent.
Stevenson avait le dossier de l’agent serré contre sa poitrine, elle l’avait consulté dans la journée. Il se présenta parfaitement en anglais – au moins un autre agent qui parlait anglais. Matthias ne serait plus le seul à devoir traduire. D’ailleurs devait-il encore traduire ? Les autres avaient fait des progrès formidables !

Il était mignon le petit, dans sa façon de formuler les choses. Elle était amusée. Elle lui tendit une main, tout en se présentant.

-« Bienvenue à MIS, Jozef ! Je m’appelle Kathleen Stevenson,  je suis la directrice de cet établissement. Est-ce que la dame qui s’est occupée de toi t’a expliqué ce qu’était exactement cet institut ? Il n’a en fait rien à voir avec l’étude d’un quelconque lieu maritime ! Je vais tout t’expliquer dans mon bureau, tout ce que tu ne sais pas encore du moins ! »

Elle se retourna pour s’y diriger, puis se retourna à nouveau, non seulement pour dire au revoir à son amie, en la remerciant encore mille fois pour le garçon, et puis, pour dire à celui-ci :

-« Mais j’aurai besoin de ton aide pour ça… »

Décidemment, les arrivées n’étaient pas joyeuses joyeuses, aujourd’hui. Était-ce finalement elle qui provoquait ses pensées à la famille. Si c’était parce qu’elle-même leur rappelait leur maman, cela rendait heureuse Kathleen. Avoir leur confiance ne serait pas trop difficile.

Celui-ci, néanmoins, ne montra aucune émotion, et déclara que ça mère était morte d’une voix aussi neutre que lorsqu’on répond machinalement « oui » ou « non » à quelqu’un qu’on a pas écouté. Intéressant, et surtout pratique pour les missions. Bien sûr, chaque agent avait ses qualités et ses défauts, mais elle savait qu’ils réussiraient tous.

Son amie ne lui avait donc pas tout expliqué. Le dilemme était toujours de savoir par où commencer. Il y avait tellement de choses à dire…

Mais d’abord, ils traversèrent le hall en silence, puis sortirent de l’autre côté, pour pénétrer dans la forêt. Même si le soleil commençait sérieusement à descendre, il faisait une chaleur étouffante en dessous des arbres. Ceux-ci semblaient retenir la chaleur. Vivement qu’ils soient dans le bureau ! Kathleen espérait vivement qu’il y fasse plus frais.

-« Bien, je vais t’expliquer tout ça alors… » Deux secondes pour organiser un dernier coup ses idées et en faire un tri, avant de reprendre la parole « L’acronyme de l’institut est MIS, qui peut faire penser à une organisation gouvernementale britannique… Sauras-tu trouver lequel ? Ça peut paraître difficile comme ça, mais c’est normal, cette organisation cherche à rester discrète » Elle appuya sur le dernier mot, c’était le petit indice supplémentaire. Il faut croire que la directrice aime bien les devinettes !

La réponse de l’agent se fit immédiate, et cela surprit presque Kathleen, même si, bien sûr, elle n’en montra rien comme il se devait, et restait impassible. Sa question à lui, en revanche, ne put l’empêcher de lui décrocher un sourire.

Ils avancèrent encore un peu. Kathleen semblait hésitante, et il semble qu’elle ne savait trop que répondre. Elle se dit alors qu’elle improviserait bien au fil de sa réponse. Le petit avait l’air fatigué, de toute façon, il ne remarquerait rien. La directrice se reconcentra en secouant légèrement la tête pour se réveiller et chasser ses autres pensées de sa tête.

-« Il s’agit en effet du MI6. » Elle ne comptait pas faire la blague de la couverture trop faible à tous les agents, cela donnerait une image négative de l’institut. Et puis, elle n’était pas toujours d’humeur à rigoler – ce qui ne signifie pas qu’elle était de mauvaise humeur néanmoins. « Indirectement, nous recherchons parfois ceux qui passent des informations aux Allemands. Mais notre rôle principal est de trouver les informations des projets qui menacent la Grande-Bretagne, pour pouvoir les arrêter efficacement par après. »

Le temps qu’elle raconte tout cela, qu’elle trouve ses mots, le groupe était arrivé devant le bâtiment principal du campus, dont Kathleen ouvrit la porte un peu lourde qui demandait un peu de force et se dirigea vers son bureau – première porte à droite. Endroit très stratégique pour retenir un visiteur indésirable…

-« Assieds-toi donc dans un des fauteuils, là » dit-elle en désignant l’amas de fauteuils dans le coin gauche de son bureau. Toujours agréable pour discuter, ce petit coin chaleureux et confortable…